dimanche 7 septembre 2008

Je vous fais partager l'histoire de Pape Diouf, PRESIDENT DE l'OM, le club de mon coeur. Ce personnage médiatique n'a pas eu une vie rose, mais le talent a pris le dessus sur l'adversité. Instructif !


Pape Diouf : «L’OM ne fait plus dans le folklore»
06/09/08 - Entretien
Pape Diouf a accordé un long entretien en deux parties à OMmag. Dans la première, il se raconte, de son enfance au Sénégal, à sa passion pour le Basket et la lecture et ses années dans le journalisme…


Président, vous attaquez votre cinquième saison à l’OM. Que vous inspire ces années de travail au sein de votre club de cœur ?
Après avoir été manager pendant quatre mois, j’ai accédé au poste de président en 2005. Avec l’équipe qui est autour de moi, notre action devait apparaître aux yeux de tous comme étant sérieuse et efficace. Nous ne voulions plus faire dans le folklore. L’actionnaire majoritaire, Robert Louis-Dreyfus, avait tant donné de sa personne et de son argent dans le passé que nos moyens étaient limités. C’était d’ailleurs légitime de sa part ! Et je crois que nous avons su nous montrer très actifs et plutôt performants. Aujourd’hui, quand on observe l’effectif de cette saison je crois qu’il a fort belle allure…

J’ai eu une enfance paisible au sein d’une famille unie


Le Président de l’OM est un personnage public reconnu largement. Mais on aimerait en savoir un peu plus sur l’homme. Que pouvez-nous dire sur votre enfance passée au Sénégal ?
J’ai eu une enfance paisible au sein d’une famille unie. Une mère très « africaine », c'est-à-dire, très protectrice et très affectueuse. Un père moins présent à la maison, mais qui a toujours fait attention à ce que nous ne manquions de rien. J’ai vécu dans un quartier qui était déjà métissé, puisque coexistaient ensemble des Sénégalais noirs mais aussi des « Mulâtres », des Libanos-Syriens et des Français.

C’est à l’âge de 18 ans que vous avez débarqué en France…
La raison principale qui m’a fait venir en France est que je devais faire l’école militaire. Quand je suis arrivé, je me suis rendu compte que c’était un véritable engagement dans l’armée et non une école. J’ai refusé de m’engager. J’ai donc dû survenir à mes besoins en enchaînant les petits boulots. Le premier, c’était en tant que coursier. Ensuite j’ai été pointeur au port de Marseille puis j’ai fait de la manutention. Bien plus tard, j’ai tenté le concours d’entrée à l’IEP d’Aix-en-Provence que j’ai réussi.

Et vous voilà donc dans l’une des plus prestigieuses écoles du sud de la France. Quelles étaient vos matières de prédilection ?
J’aimais profondément la sociologie politique. C’est dans celle-ci que j’ai obtenu mes meilleures notes. J’avais aussi beaucoup d’intérêt pour l’histoire des institutions politiques.
Je suis resté à l’IEP pendant deux années. Mais par la suite, la réalité a repris le dessus. J’ai repris le travail, car je n’avais plus de quoi vivre.

De 1976 à 1987, vous travaillez au sein de la rédaction du quotidien La Marseillaise.Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?
Ce furent des années fabuleuses pour moi. J’y ai d’abord travaillé en tant que « claviste » (ndlr : personne qui compose sur un clavier les caractères d’un texte à imprimer), puis comme correcteur. En même temps, j’étais déjà pigiste au service des sports. On m’a ensuite proposé de me consacrer uniquement au service des sports. Et c’est ce que j’ai fait. Au départ, j’étais chargé de la rubrique du basket.

J’adorais le basket. C’est sans doute le sport ou j’ai joué au plus haut niveau, pratiquement en première division


Pourquoi ce sport ?
Parce que j’adorais le basket. Je l’avais pratiqué durant ma jeunesse. C’est sans doute le sport ou j’ai joué au plus haut niveau, pratiquement en première division. Mais le football restait aussi mon autre passion. Et par la suite, je suis même devenu responsable de la rubrique football.

En quoi ce passé de journaliste est important pour vous ?
J’ai pu avoir une approche directe du milieu du football. Outre l’excellente camaraderie qui régnait à cette époque-là, j’ai reçu deux fois le « Prix Martini » qui récompensait le meilleur article de l’année.

Quels étaient les thèmes de ces articles ?
Le premier était un sujet qui portait sur la Guadeloupe, où je passais mes vacances. A la base, cela devait être un article relatif au sport guadeloupéen, mais à l’époque, il y avait un fort mouvement d’indépendantisme là-bas, assez violent d’ailleurs. Au milieu de ce brouhaha, j’ai essayé de montrer que l’île était une dépendance française en grande ébullition.
Le second, c’était au lendemain de la Coupe d’Afrique des Nations de 1984. J’avais fait un article sur la Côte d’Ivoire traditionnelle, politique, économique et sociale. Enfin, j’avais fait un compte de Noël sur la Palestine qui m’avait valu plus tard, d’arriver deuxième du « Prix Martini ».

L’écriture vous manque-t-elle aujourd’hui ?
Elle ne me manque pas, car j’associe étroitement écriture et lecture. Pour moi, l’écriture et la lecture sont les deux mamelles d’une même exigence. J’aime autant les deux exercices. J’ai toujours lu. Aujourd’hui, je n’écris pratiquement plus, mais je continue de lire. Un peu moins d’un point de vue du temps, mais bien meilleur au niveau de la qualité. La lecture ne compense pas le fait que je n’écrive plus. Si l’on parle de compensation, cela veut dire qu’il y a un manque. Et je n’en ai pas.

Beaucoup de personnalités se donnent au jeu de l’écriture aux travers d’autobiographies ou de témoignages. Est-ce que cela vous traverse l’esprit ?
Il n’est pas impossible que je réponde favorablement aux sollicitations dont je fais l’objet aujourd’hui. Raconter mon parcours, c’est envisageable… Mais, être l’auteur d’un livre sur un sujet bien précis, je ne crois pas. Avoir la prétention d’écrire sur un sujet essentiel, cela suppose beaucoup de talent. Je ne prétends pas à ce talent-là. Un livre médiocre ne m’intéresserait pas, il faudrait qu’il soit d’une densité incroyable. Je n’ai pas le talent du livre dont je rêve !

J’ai rapidement opté pour le quotidien car cela me correspondait mieux

Revenons-en à votre parcours professionnel et à votre départ de la Marseillaise…
En quittant la Marseillaise, je suis parti à l’hebdomadaire qui avait été lancé par Michel Pezet. C’était un outil de combat nécessaire pour contrer le Provençal de Gaston Deferre, à l’époque.La direction était assurée par Jean-Noël Tassez qui était également au sein de la rédaction de la Marseillaise. Je me suis très vite senti à l’étroit car la périodicité hebdomadaire ne me convenait pas. Avant, je suivais les affaires de l’OM au jour le jour. Devoir les commenter, une fois par semaine me frustrait énormément. Dans le même temps, j’ai été l’objet de multiples propositions. D’une part, Jacques Thibert le rédacteur en chef de France Football souhaitait me recruter. D’autre part, des journalistes venus de France Football et de l’Equipe souhaitaient fonder un nouveau quotidien : Le Sport.

Et vous avez donc fait partit de cette fabuleuse aventure…
J’ai rapidement opté pour le quotidien car cela me correspondait mieux. J’avais aussi envie de vivre cette aventure. France Football était déjà une institution, le Sport avait la vie devant lui…Il n’a duré qu’un an. Une brouille est apparue entre les actionnaires. C’est ce qui a conduit à son arrêt.

Cela vous a-t-il attristé ?
C’est vrai. C’était un « canard » dans lequel écrivaient des journalistes de talent comme Philippe Broussard, qui travaille aujourd’hui à L’Express, Claude Askolovitch du Nouvel Observateur, Jérôme Bureau, le patron de la rédaction de M6. Récemment, a été célébré le 20e anniversaire de la création du journal, ce n’est pas un hasard. Je n’ai malheureusement pas pu y aller, car j’étais hospitalisé. En densité, je crois que c’est la seule rédaction en France qui a réuni autant de talents, en si peu de temps.

Comment expliquez-vous qu’il y ait en France un monopole exercé par L’équipe ?
C’est très dur de lancer un quotidien. Pour être à l’équilibre, il fallait que l’on vende 120 000 exemplaires et on avait une moyenne de 80 000. Et puis, il y a eu une campagne de publicité monstrueuse de la part de L’équipe avec le slogan « plus haut, plus loin, plus fort ». L’équipe a réaménagé son contenu, a rajouté de la couleur dans son titre, a commencé à noter les joueurs dans les comptes-rendus de football, ce qui ne se faisait clairement pas à l’époque. Dans les kiosques, le journal a multiplié les exemplaires mis en place. Il y a eu une réaction de survie. Et l’histoire s’est mal terminée. Si le Sport existait encore, j’en serais très certainement de la partie. Peut-être en temps que responsable de la rédaction…